On s’approche gentiment du pied de la Dole, le point culminant du parcours. Cela monte en pente faible toujours en sous-bois, puis on traverse des Alpage où je peux apprécier un peu de verdure et la compagnie des vaches. Là, les choses se gâtent avec une méchante ascension à découvert sur une piste de ski le long d’une télécabine. Cela me rappelle l’ascension de la Flégère au marathon du Mont Blanc. Me voilà enfin aux Dappes, au pied de la Dole ! Dernière barrière horaire passée, maintenant je sais qu’il ne dépend plus que de moi d’aller au bout !
Ma montre me lâche dès les premiers mètres de la montée. 9h de course sont passées, plus de batterie ! J’imagine que Quentin est proche de l’arrivée. Je monte à mon rythme et rattrape même quelques concurrents. Le temps se gâte et le vent se lève, je décide de remettre la veste. Imaginez enfiler un jean à la sortie de la machine à laver et bien là, même effet! Bien sûr je l’avais foutue en boule dans mon sac donc faut déjà la remettre sur l’endroit ! Encore trempée, ça colle, je n’arrive pas à l’enfiler, c’est froid, bref me revoilà à pester toute seule ! J’abandonne les gants, vous avez déjà essayé de remettre des gants mouillés à l’endroit ?! Le temps que j’y parvienne, je serai déjà rentrée à Valence ! Après cette pause vestimentaire, je reçois un appel de Quentin. Il a fini (la chance !) et m’annonce une superbe vue en haut de la Dole pour me motiver… Je lève la tête et pour l’instant j’ai peu d’espoir, je distingue à peine le gars devant moi tellement il y a du brouillard !
Donc pour la beauté du paysage, vous m’excuserez, mais vous repasserez, moi je n’ai rien vu ! Enfin, je parviens quand même à atteindre le sommet. Il n’y a pas un chat (çà me direz-vous c’est logique à 1700m d’altitude !), pas un spectateur, pas un signaleur, pas un bouquetin, non personne à par moi, et j’imagine les quelques concurrents doublés dans la montée qui ne doivent pas être loin derrière ! D’après mon profil je sais que le sommet de la Dole est au 60e km donc je tiens le bon bout ! La descente est un parcours du combattant, les pierres mouillées ne permettent pas des appuis bien stables, manquerait plus que je me blesse au milieu de nulle part, mourir là toute seule dans le froid et le brouillard non quand même ce n’est pas drôle !
Je décide de rappeler Quentin, bien sûr lors du seul moment de la course où on est en Suisse !! Et Bim 350 € ça fait cher l’appel pour s’entendre dire si ça va pas, tu arrêtes… Non mais de toute façon je suis bien obligée d’avancer vu que je me trouve dans un no man’s land.
J’attaque la dernière difficulté, le col de Porte que je trouve bien plus dur que la Dole et avec ce brouillard de plus en plus épais, je me demande si je ne vais pas finir par me perdre. J’arrive finalement à me hisser au sommet. Désormais toutes mes batteries sont à plat, plus de montre, plus de téléphone, plus de musique et surtout plus de jambes ! Je me console en me disant que la fin est proche (la fin de la course hein pas la fin tout court, je ne suis pas désespérée à ce point tout de même !). La descente est sinueuse, glissante et pénible ! Le dernier ravito se pointe devant moi. On nous indique encore 7 km. J’avale un bouillon de légumes pour me réchauffer. Je tente un bout de Comté, non rien à faire, ça ne veut pas ! Alors tant pis, je repars !
La fin de parcours est vallonnée, je réussis à rattraper quelques concurrents. Nous sommes déjà proche des Rousses mais je ne reconnais rien ! On nous fait passer dans une rivière histoire de bien laver les pompes et ne pas arriver trop boueux sur la ligne !
Ça n’en finit pas ! Et là, sur une large piste, que vois-je devant moi ?! Un maillot bleu familier, c’est mon Alain ! Incroyable ! Il doit nous rester à peine 5 km mais on va finir ensemble ! Cela nous redonne un peu d’énergie à tous les deux ! En discutant, on se rend compte qu’on n’était finalement pas très loin l’un de l’autre pendant toute la course (si je n’avais pas fait ce début de course minable, peut-être qu’on aurait pu courir ensemble…).
Et nous voilà au fort des Rousses, l’arrivée est toute proche. Des spectateurs nous annoncent 500 m ! 500 m vous êtes surs ??! Car attention à ce stade de la course, on est très pointilleux sur les mètres !!
Oui ils ont raison, dernière descente et on voit Philippe T et Quentin, ils alertent tout le groupe des copains qui nous attendent au pied de l’arche et se mettent à crier et à nous faire signe !
Attention, petite séquence émotion, je suis toute émue de les voir ! Dernières foulées dans les rues de la station et nous franchissons la ligne sous les acclamations du JCP et du speaker !
Eh bien voilà, je suis, nous sommes, finishers de la Transju’trail ! Je ne donnais pas cher de ma peau au 5e km mais contre toute attente, je suis allée au bout ! 12h04, dans le temps que je m’étais fixé alors que je croyais avoir explosé mon objectif tant je n’avais aucune notion de l’heure qu’il était !
C’est incroyable comme une fois passé la ligne, on oublie tout, la souffrance, les jambes en coton, les maux de ventre, la pluie, la boue, les chutes… Ne reste que la fierté et la joie !
Un grand merci pour tous vos encouragements, vos message de soutien, l’accueil à l’arrivée, les mots de réconfort, les accolades et les bisous magiques. Une mention particulière à ma Maman et Sabine, pour les coups de boost par téléphone qui tombaient toujours à pic, à Quentin bien sûr pour supporter au quotidien une petite coureuse qui tente de devenir ultratraileuse avec tout le package de doutes et de remise en question qui va avec, et aussi à Magic System parce que y’a pas à dire, quand tu es au plus bas, ben un coup de « Let the Magic in the air » et ça repart
BRAVO A TOUTES ET A TOUS, encore un superbe moment avec vous !!
Jennifer
Un très beau récit Jenni ! Encore félicitations pour cette super course dans des conditions plus que difficiles.
RépondreSupprimerMorgane
Merci à tous pour les messages sur FB et ici ! :)
RépondreSupprimersuper recit avec toujours une petite pointe d'humour, tu es une super traileuse .encore bravo
RépondreSupprimerbravo Jenni pour ce récit !je tenais à te féliciter pour avoir réussi ce défi. chapeau bas et bravo encore à tous les finishers!!!
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