jeudi 22 mars 2018

Trail du Ventoux 1/2

Cette aventure commence par un petit conciliabule intérieur

Petite réunion entre mes cuisses et mes mollets,‭ ‬et le reste du corps‭……

-‭     «‬ Les muscles :‭ «‬ Bon les gars,‭ ‬on a un peu en travers,‭ ‬son entrainement à la Chapelle Saint Médard,‭ ‬alors qu’on était moyennement chaud,‭ ‬bon d’accord,‭ ‬on lui a fait payer sur le trail de la Pierre Sanglante,‭ ‬ou je pense qu’il a bien senti,‭ ‬que si on ne voulait pas,‭ ‬il n’avancerait pas,‭ ‬mais là,‭ ‬cette course est importante,‭ ‬il ne sera pas seul,‭ ‬alors on le lâche pas,‭ ‬et on y va tous ensemble.‭
- Ok pour les mollets ‭?
- OK.
- Nous,‭ les cuisses on sera là
-‭ ‬Poumons Ok ‭?
- OK.
- Bon,‭ ‬tout le monde est en marche,‭ ‬on fait remonter l’info au mental ‭»
…….
Faire le trail du Ventoux,‭ ‬cette idée était en moi depuis longtemps,‭ ‬après avoir vu quelques vidéos sur cette course.‭ ‬La recherche de nouveaux paysages étant ma principale motivation,‭ ‬c’est un soir après quelques échanges sur Facebook,‭ ‬que je prends la décision de m’y inscrire.‭ ‬46‭ ‬km sont annoncés et un dénivelé de‭ ‬2400‭ m ‬de D+,‭ ‬cela constitue un joli morceau.‭

Je ne reviendrai pas,‭ ‬sur ma préparation,‭ ‬je l’ai déjà fait (‬ni sur mes petits dialogues intérieurs‭)‬.‭ ‬Cette préparation,‭ ‬sera ternie par la blessure de ma binôme préférée,‭ ‬Sabine,‭ ‬qui après avoir couru‭ ‬23‭ ‬km dans des conditions pas simples,‭ ‬se fait une entorse mémorable au parc de Lorient,‭ ‬alors que l’on courait sur ce que l’on peut qualifier de moquette,‭ ‬au vue des précédentes sorties.‭ ‬C’est donc un peu en orphelin sportif,‭ ‬que je termine cette préparation.‭ ‬Je passerai rapidement sur le Trail de la pierre sanglante,‭ ‬qui fut un calvaire de‭ ‬20‭ ‬km,‭ ‬où je fus dans le rouge tout le long,‭ ‬avec des jambes en bois.

Bref c’est moyennement confiant que j’aborde cette course,‭ ‬à l’assaut de ce sommet mythique.‭ ‬Je vous assure que vue d’en bas,‭ ‬il impose le respect,‭ ‬il a été l’objectif de tant de sportifs,‭ ‬c’est à mon tour,‭ ‬aujourd’hui de le défier,‭ ‬j’espère juste en être digne.

C’est donc‭ accompagné d’une bien belle équipe que nous aborderons ce week-end,‭ ‬une belle flotte d’avions de chasse.‭ ‬Lorsque la veille du départ,‭ ‬chacun décline son objectif en terme de temps,‭ ‬je me sens mais vraiment tout petit,‭ ‬en espérant en mon for intérieur que mon corps,‭ ‬avec qui j’étais un peu en froid ces derniers temps‭ (‬CF mon récit précédent‭) ‬répondra présent.
Je file donc me coucher,‭ ‬en essayant de faire en sorte que mon mental et mon corps,‭ ‬s’entendent au mieux.

Et pendant cette dernière nuit avant la course, ‭…‬..
Le mental :‭ «‬ Oh les muscles,‭ ‬vous êtes là ‭?‬ ‭»
Les muscles :‭ «‬ Oui c’est bon on est là ‭»
Le mental :‭ «‬ Bon vous avez entendu les dernières infos ‭? ‬Va pas falloir le lâcher ‭»
Les muscles :‭ «‬ C’est bon c’est OK on sera là,‭ ‬on lui a déjà fait payer lors du trail de la‭  ‬Pierre sanglante,‭ ‬mais cette fois,‭ ‬c’est bon on assure.‭ ‬Mais attention il faut aussi qu’il assure lui aussi,‭ ‬et qu’il nous donne du carburant s’il veut qu’on avance ‭»
Le mental :‭ «‬ C’est bon je m’en occupe.‭ ‬On se rappelle demain ‭»
……….
Debout à‭ ‬5‭ ‬H,‭ ‬ça pique un peu,‭ ‬surtout quand on sait ce qui nous attend.‭ ‬L’excitation se mêlant à l’appréhension.
Un petit dej envoyé,‭ ‬toute l’équipe se met en marche,‭ ‬direction Bédoin,‭ ‬pour un départ annoncé à‭ ‬8h.
Derniers mots échangés avec les copains,‭ ‬des encouragements et surtout du plaisir,‭ ‬on est quand même là pour cela,‭ ‬surtout.‭ ‬On se promet de tous se retrouver à l’arrivée.‭ ‬Pour ma part,‭ ‬je me dis que les copains devront être patients,‭ ‬vu notre différence de niveau.‭
C’est aussi à ce moment là que nous échangeons nos derniers mots avec nos accompagnants,‭ ‬Séverine,‭ ‬Cécile,‭ ‬Sabine et Thierry.‭ ‬Pour ma part ces quelques mots,‭ ‬ces poignées‭ de mains,‭ ‬me donnent une énergie indispensable à la réussite d’une course.‭ ‬Merci d’avoir été tout simplement là,‭ ‬vous avez été précieux tous autant que vous êtes.
Intervention du mental :
‭«‬ C’est bon arrête,‭ ‬tu vas nous faire chialer ‭»
Désolé,‭ ‬on ne maitrise pas toujours son mental‭……‬.

8h sur la ligne de départ,‭ ‬les dernières consignes sont données,‭ ‬et c’est partie pour cette belle aventure.‭ ‬Je me suis placé au milieu du peloton,‭ ‬c’est tranquille que nous abordons les premiers kilomètres,‭ ‬la route est encore longue ‬et il est hors de question de se mettre mal dés le départ.
Les premiers kilomètres nous font passer par une carrière d’ocre,‭ ‬vallonnée,‭ ‬courir dans le sable,‭ ‬n’est pas ce que je préfère,‭ ‬mais je passe cette partie en étant aux deux tiers du peloton.‭
Une légère partie descendante‭ ‬nous permet de récupérer et‭ ‬nous amène sur les premiers contreforts de ce géant de Provence.‭ ‬Les premières montées ‬nous réservent quelques pentes assez‭ sèchent,‭ ‬mais je les passe sans y laisser trop de plume,‭ ‬bien aidé par mes bâtons.

Les muscles :‭ «‬ Allez les gars on y va au charbon,‭ ‬c’est maintenant et ce n’est que le début,‭ ‬on soutient le gros‭»

Je sens que mon corps me suit,‭ ‬les jambes et le souffle sont là,‭ ‬je monte à un rythme régulier‭ ‬et d’un bon pas.‭
14ème ‬Kilomètres,‭ ‬900‭ ‬de D+‭  ‬on arrive au premier ravitaillement,‭ ‬j’y retrouve les copains qui nous accompagnent,‭ ‬j’apprends que Jenni,‭ ‬est juste une minute devant,‭ ‬et qu’elle s’est à peine arrêter.‭
Le mental :‭ «‬ N’oublie pas de te nourrir,‭ ‬mon garçon,‭ ‬les muscles répondent,‭ ‬mais il faut les nourrir,‭ ‬je leur ai promis,‭ ‬alors,‭ ‬avale moi quelques pâtes de fruits ‬et un peu d’eau et je gère derrière la cavalerie ‭»

Me sentant bien,‭ ‬je profite pour avaler quelques pâtes de fruit,‭ ‬un verre de Saint Yorre.‭ ‬Je refais le plein de la gourde.
Il reste encore‭ ‬8‭ ‬km avant le sommet,‭ ‬les premières plaques de neige ne vont pas tarder à apparaitre,‭ ‬je décide donc de mettre la veste,‭ ‬j’ai chaud‭ ‬et je veux bien conserver cette température pour le sommet.‭
Une bise à l’assistance ‬et on file direction le sommet.‭ Les premiers lacets se passent bien,‭ ‬on monte sur un rythme régulier on court dés que c’est possible,‭ ‬pourtant je sens comme une première alerte,‭ ‬en effet des douleurs à l’estomac‭ ‬commencent à se faire sentir.

Le mental :‭ «‬ Alerte,‭ ‬l’estomac nous fait remonter des infos,‭ ‬il ne va pas bien,‭ ‬l’eau froide‭  ‬certainement,‭ ‬continue d’avancer j’essaye de le gérer ‭»

Malgré les douleurs,‭ ‬je décide de maintenir le rythme,‭ ‬tout le reste fonctionne bien,‭ ‬je prends un réel plaisir à être au milieu d’un tel décor,‭ ‬ je languis d’atteindre ce sommet et de voir ce fameux observatoire.‭
La montée se fait à travers bois avec quelques passages qui commencent à bien chauffer les mollets,‭ ‬les‭ ‬1000‭ ‬de D+‭ ‬ont largement été dépassés.‭ ‬C’est sûr certains de ces passages que je suis obligé de m’arrêter,‭ ‬les douleurs à l’estomac commencent réellement à devenir gênantes.
On arrive enfin sur une large piste bien enneigée,‭ ‬certains s’arrêtent pour chausser leurs chaines sur leurs baskets.‭ ‬Le paysage à ce moment là est absolument magnifique,‭ ‬nous évoluons sur une large piste damée‭ (‬un immense merci aux organisateurs qui ont fait un boulot de fou pour permettre le passage de la course‭) ‬au milieu des sapins enneigés,‭ avec un joli soleil et une vue magnifique sur la vallée en contrebas.
C’est malheureusement à ce moment là que je sens qu’il y a un réel problème avec mon ventre.

Le mental :‭ «‬ On passe en alerte rouge,‭ ‬le ventre ne gère plus,‭ ‬il faut évacuer ce qui gène si non c’est ‭………‬non je ne préfère pas y penser. ‭»

La montée bien que magnifique ne se fait pas comme je l’aurai souhaité,‭ ‬je sens que mon ventre me fait de plus en plus mal ‬et je vais avoir du mal à continuer sans faire une pause‭……‬.,‭ ‬je vous passe les détails.‭ ‬Mais comment vous dire,‭ ‬que,‭ ‬lorsque vous vous trouvez sur un large piste blanche avec‭ ‬600‭ ‬coureurs devant vous et à peu prés‭ ‬300‭ ‬derrières vous,‭ ‬vous vous demandez comment vous allez vous sortir de ce merdier,‭ ‬désolé mais à ce moment là je n’ai pas d’autres mots.

Le mental :‭ «‬ Alerte rouge dépassée,‭ ‬on passe en mode survie,‭ ‬il faut évacuer,‭ ‬le foie est en carafe et ne répond plus,‭ ‬l’eau froide l’a bloqué. ‭»

Avertissement sur le passage qui vient,‭ ‬âme sensible s’abstenir.

N’en pouvant plus je m’arrête,‭ ‬et miracle,‭ ‬un mètre en contrebas,‭ ‬un sapin qui me servira de paravent à la‭ vue des coureurs qui déboulent de tous les côtés.‭
On ne s’étalera pas sur ce qui suit,‭ ‬voulant garder un minimum de dignité,‭ ‬dans ce club.

Le mental :‭ «‬ Ce n’est pas très chic,‭ ‬mais au moins ça va mieux,‭ ‬le foie revient à lui.‭ ‬C’est bon,‭ ‬cours,‭ ‬je gère le reste ‭»

C’est donc un peu plus léger que je repars à l’assaut du sommet,‭ ‬et surtout avec des douleurs en diminution,‭ ‬le plaisir de courir reprenant le pas sur l’appréhension d’une catastrophe.‭
Ludo

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